Ma Tribune : Comment avez-vous découvert votre cancer du sein ?
Aïcha Bagayogo : Un jour sous la douche, j’ai senti un bouton dans mon sein droit. Mais c’était sans douleur. J’ai informé ma maman qui m’a envoyé consulter. Le médecin à son tour m’a référé à un gynécologue à Kati. Celui-ci m’a donné des analyses à faire. Le coût était tellement élevé que j’ai pris du temps avant de les faire. Car mon père était déjà à la retraite avec une grande famille à sa charge. Quant à ma mère, elle fait des petits commerces de médicaments traditionnels et je n’étais qu’une simple stagiaire à la mairie de la Commune III de Bamako.
Je ne savais plus quoi faire. Un jour je suis tombée malade du paludisme et un agent de notre service m’a envoyé un message me souhaitant prompte rétablissement. C’est là que j’ai eu le courage de l’informer que j’avais des analyses à faire mais qui sont très chères pour moi. Il m’a dit de lui envoyer le prix et m’a beaucoup aidé.
Après ces analyses, le gynécologue m’a informé qu’il faut m’opérer le sein. Dieu faisant bien les choses, mon collègue qui m’a aidé pour mes analyses a en parlé à son épouse qui travaille à l’hôpital Mère-Enfant le Luxembourg à Hamdallaye. Celle-ci informée de ma situation m’a confiée au Dr. Nimaga du Luxembourg. Le médecin s’est référé directement au résultat de mes analyses et m’a donné rendez-vous pour une intervention. chirurgicale.
Mali Tribune : Quelle a été votre réaction à l’annonce de votre cancer ?
A. B. : C’est le 21 janvier 2020 que j’ai été opérée du sein. 20 jours après, on m’annonce que je suis atteinte du cancer du sein. La triste nouvelle ne m’a pas paniqué. Je me suis résignée en disant que tout ce que Dieu fait est bon, c’est peut-être mon destin ! Il faut maintenant commencer le traitement mais avec quel argent ?
Mali Tribune : Votre traitement se passe comment ?
A. B. : Tout d’abord c’est mon médecin qui m’a dit de commencer la chimiothérapie, un mot dont j’ignorai tout. Il me dit, Aïchata qui paye tes médicaments ? Je réponds que c’est moi-même. Il me regarde et dit je suis au sérieuse ? Je réponds en jurant cette fois-ci. C’est là qu’il promet de m’aider et que je vais guérir par la grâce de Dieu sans savoir ce qui m’attendait.
Mali Tribune : Comment s’est déroulée la chimiothérapie ?
A. B. : A mon premier rendez-vous de chimiothérapie, on m’a donné une analyse et une ordonnance. En voyant le prix, j’ai eu peur et j’ai passé 3 jours sans savoir où trouver cette somme. C’est encore mon médecin qui m’a aidé à travers le service social de la Canam pour réduire le prix à payer pour mes analyses ainsi que mes ordonnances. C’est après réception de cette fiche que j’ai pu commencer la chimiothérapie.
Mali Tribune : Cela a été facile pour vous de continuer à vous battre sans moyens ?
A. B. : J’étais obligée de faire des petits commerces de gâteau et autres en plus de mon stage à la mairie pour pouvoir payer mes médicaments. Vous savez qu’il est déconseillé de s’approcher du feu quand on suit la séance de chimiothérapie. Je n’avais pas le choix. J’ai passé 6 mois à me battre pour payer le coût. 6 mois après, le médecin m’a envoyé faire le scanner.
Pour m’informer des résultats du scanner, mon médecin s’est fait accompagner de plusieurs autres médecins. Ensemble, ils m’ont annoncé une autre mauvaise nouvelle : l’ablation de mon sein qui venait d’être opéré. J’étais bouleversée. Pas pour mon sein, mais parce que j’avais un rêve, celui de devenir policière. J’avais déjà commencé les procédures de recrutement. Mon nom figurait sur la liste des candidats.
La question que je me posais était de savoir si je pourrais me présenter au concours de la police avec un sein coupé ? Mon médecin n’arrêtait pas de me consoler en me faisant comprendre que j’allais guérir même s’il était plus abattu que moi-même.
Une deuxième opération a été programmée, le 6 décembre 2020. En une année j’ai suivi 2 interventions chirurgicales. On m’a encore envoyé pour la radiothérapie chez un autre médecin à l’hôpital du Mali et c’était une dame qui s’est très bien occupée de moi. Elle m’a donné rendez-vous pour des séances pendant 15 jours. Après j’ai été mise sous contrôle et chaque 3 mois il fallait faire un scanner, après c’est devenu une fois par an.
Mali Tribune : Après tout ça, y a-t-il une amélioration dans votre état de santé ?
A. B. : Subitement, en juin dernier, j’ai senti des douleurs à la poitrine et c’était également le moment de faire mon scanner annuel. Le résultat m’annonce un nouveau problème : la maladie a atteint mon poumon. Il faut reprendre la chimiothérapie. Ce qui m’a encore fait peur car la chimiothérapie est trop chère et complexe. Le médicament le plus important coûte 70 000 F CFA par séance. Il faut aussi des analyses, des ordonnances et la chimiothérapie qui s’élève à 25 000 F CFA.
En pensant guérir, la maladie cannait une autre complication. Vivre avec le cancer n’est pas chose aisée, mais on ne peut pas changer son destin. Je remets tout à Dieu car c’est lui qui a le dernier mot. Si j’avais les moyens, le cancer allait disparaître, je soufre à cause de cette maladie.
Comme conseil, je demande aux femmes de faire énormément attention à leur santé car mieux vaut prévenir que guérir. Après chaque menstrue, elles doivent contrôler les seins en s’autopalpant.
Propos recueillis par
Odile Dembélé
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