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In Memorium : Il y a 4 ans, l’imperturbable général Boubacar Baba Diarra se couchait définitivement

Durant toute sa carrière administrative, il est demeuré un flic au sens réel du terme, déjouant les coups bas et trouvant la bonne manière pour justifier sa conviction, source de désamour presque partout où il a passé. A l’occasion du quatrième anniversaire de son décès nous revenons de façon succincte sur ce que fut sa vie.

Figure marquante de la vie publique malienne, feu Boubacar Baba Diarra appartient à cette génération d’hommes qui ont pratiqué l’Etat dans ses multiples strates : sécurité, armée, administration, sport.

Au plan professionnel, la promotion de Boubacar Baba Diarra devrait être une crème de la police malienne parce que le pouvoir d’alors avait des projets énormes pour revaloriser la corporation qui, à l’époque, bénéficiait d’un respect et d’une grande considération de la part de la population.

Boubacar Baba Diarra qui est un des fruits de cette génération, est demeuré un véritable policier, un flic doté d’une intelligence extraordinaire, qui sait prendre une décision. A la fois rigoureux et ambitieux, reconnu pour son attachement au pays natal, il a sans doute marqué les esprits par son parcours atypique.

Cependant, la chute du puissant directeur général de la sûreté nationale, Tiécoro Bagayoko, arrêté par le colonel-président Moussa Traoré, le 28 février 1978 avant la fin de leur formation, redirige son destin. Là où d’autres auraient vu une impasse, lui transforme la rupture en opportunité.

Au terme de sa formation, il rejoint illico les rangs de l’armée malienne, où il servira longtemps, avec constance. Au fil des ans, Baba Diarra s’impose par sa capacité à structurer, organiser et assainir les services qu’on lui confie. Il occupe plusieurs postes clés, notamment dans la gestion financière de structures étatiques.

– Chef de la division économique de la Brigade d’investigations criminelles de la direction générale des services de sécurité (avril-septembre 1979). Quelques mois après, il bénéficie d’une bourse pour l’Université de Caen (Institut d’administration des entreprises UER : préparation aux affaires). Ces études sont sanctionnées par un Doctorat de 3e cycle, option sciences d’analyses et de gestion des organisations, à la suite d’une thèse soutenue avec les félicitations du Jury.

En plus de ce cursus, Boubacar Baba Diarra a effectué une multitude de stages et de voyages d’études à travers le monde, sur divers thèmes. Auxquels il faut ajouter :

– Sa participation en qualité d’expert aux travaux du Comité spécial des Nations unies chargé de l’élaboration d’une Convention sur la criminalité transnationale organisée et ses protocoles additionnels, convention signée à Palerme (Italie) en 2000 ;

– Sa participation en 2017 en tant premier auditeur africain au sud du Sahara au cycle de formation de l’Institut des hautes études de sécurité de France (le pendant de l’Ecole de guerre chez les militaires).

Rompu aux arcanes du travail administratif !

A son retour de l’Université de Caen, il entame une longue et riche carrière administrative. Il fut :

– Chef de la division administrative et financière de la DCMB (direction centrale du matériel et bâtiments des armées 1982-1987) ;

– Directeur adjoint de la DCMB, cumulativement avec ses fonctions de Daf ;

– Directeur général de l’Office pour l’exploitation des ressources hydrauliques du Haut Niger (1988-1991) ;

– Directeur du département économique de la direction générale des services de la Sécurité d’Etat, chargé spécialement de la lutte contre les infractions à caractère économique et financier (1991-1992) ;

– Directeur administratif et financier du ministère des Forces armées et des Anciens combattants (1992-1994).

Suite à la démilitarisation de la police nationale en 1994, Boubacar Baba Diarra est mis à la disposition de la direction des services de l’administration, de la comptabilité et du matériel de la direction générale de la police nationale (DGPN).

Deux ans après, il est nommé chef du Bureau d’études de la planification et de l’informatique à la DGPN (1996-2001). Une fonction au bout de laquelle son directeur lui confie la gestion de son cabinet (2001-2002).

A partir de 2003, il est propulsé au poste de chef de cabinet du ministère de l’Administration territoriale et des Collectivités locales. Boubacar Baba Diarra ne quittera ces fonctions qu’onze ans après, pour être conseiller spécial du président de la République (mars 2013-novembre 2013).

Alors commença son mandat à la tête de la Fédération malienne de football pour quatre ans. Auparavant il a été :

– Vice-président du Centre Salif Kéita (1996-1998) ;

– Membre du bureau de la Fémafoot (1998-2002)

– Vice-président du bureau de la Fémafoot (2005- 2009)

– Président du Djoliba AC (mars 2012-octobre 2013).

Malheureusement, en sa qualité de président de la Fémafoot, Boubacar Baba Diarra se retrouvera dans une zone de turbulence, sous la forme d’une crise aiguë, qui aboutit à l’invective et à la surenchère verbale

Homme d’ordre, habitué aux environnements sensibles, il se fait une réputation de gestionnaire austère mais efficace. Cette polyvalence, nourrie par une formation et une capacité intellectuelle aiguisée, devient sa marque de fabrique.

Boubacar Baba Diarra arrive à la Fémafoot avec une vision claire : remettre de l’ordre, renforcer les bases, professionnaliser la Fédération et impulser une culture de discipline. Il croit fermement que le Mali dispose de talents suffisamment brillants pour s’imposer en Afrique, mais que l’organisation doit suivre. D’autant plus qu’il a été longtemps responsable du football des jeunes, avec les résultats appréciables connus dans les compétitions d’âge.  Mais très vite, sa méthode heurte. Direct, parfois tranchant, il n’hésite pas à imposer des décisions qui, pour certains, manquent de concertation. Certains le traitent même de dictateur. Alors les tensions s’installent dans le monde football malien, entre la Fémafoot et certains de ses membres (ligues et clubs) d’une part et la Fémafoot et département des Sports d’autre part.

Ces incompréhensions culminent en 2017 avec le conflit inédit entre la Fédération et le ministère des Sports. Celui-ci, avec à sa tête le ministre Housséini Amion Guindo, dissout le Comité exécutif et installe un Comité de normalisation. S’en suit une intransigeance de la Fifa qui aboutit au rétablissement de l’instance dirigeante de la Fémafoot.

Ce choc inédit constitue le point de départ de la plus grande crise que le football malien ait connue. Les répercussions se font encore sentir aujourd’hui : divisions persistantes, perte de confiance, affaiblissement des clubs, méfiance généralisée.

Pour ses partisans, Boubacar Baba Diarra est un homme de principes et un gestionnaire solide qui voyait loin. Pour ses détracteurs, il est au contraire un dirigeant trop autoritaire, peu ouvert au dialogue et responsable d’un climat explosif. La vérité se situe probablement entre les deux. Boubacar Baba Diarra restera un personnage clé du paysage institutionnel malien. Car il fut un officier respecté, un administrateur rigoureux, un amoureux du football, un dirigeant qui n’a jamais renoncé à défendre sa vision.

O. Roger Sissoko

Crédito: Link de origem

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